26 juillet 2017
Delphine Pichard

Alors que notre système d’éducation se focalise sur le développement de notre « intelligence intellectuelle », sur la base notamment de notre QI (quotient intellectuel), on observe depuis quelques décennies maintenant, que cela ne suffit pas pour faire preuve de réussite ou de performance. En fait, c’est même plutôt l’inverse, puisque les enfants dits « surdoués » ont souvent du mal à s’épanouir à l’école comme à la maison.

Il y a forcément des facteurs qui stimulent et inhibent les aptitudes intellectuelles, l’intelligence émotionnelle s’est révélé suite à ce constat.

Une forme d’intelligence sociale qui implique l’aptitude à contrôler ses propres émotions et celles des autres, à discriminer entre elles et à utiliser cette information pour guider à la fois sa pensée et son action » (Salovey et Mayer, 1990)

 

Existence de l’intelligence émotionnelle : 4 arguments convaincants

Selon Daniel Goleman, docteur en psychologie et auteur du livre « L’intelligence émotionnelle », paru en 1995, et qui fait référence sur la question :

« la partie émotionnelle de notre cerveau est la base du développement de notre pensée »

Pour donner du poids à sa théorie, il s’emploie à démontrer l’influence de nos émotions sur notre vie et notamment, sur nos performances et nos échecs.

Les avantages de la maîtrise des pulsions

Nos émotions peuvent bloquer ou amplifier notre capacité de penser, de planifier, de viser un but ou de résoudre un problème, comme le démontre le test des bonbons qui consiste à expérimenter les comportements d’enfants de quatre ans, face à un choix cornélien : avoir un bonbon maintenant, ou attendre un moment pour en avoir deux. La majorité se rue sur le bonbon, incapable d’attendre, les autres résistent à leur impulsion au prix d’un effort contraignant :-/

Les dispositions d’esprit négatives, une entrave à la pensée

Un état d’esprit négatif est mauvais pour la pensée ; l’anxiété par exemple peut engendrer un immobilisme cognitif et ainsi miner l’intellect, comme c’est parfois le cas en période pour un examen, pour une prise de parole en public pour ceux qui n’aiment pas cela, ou pour rendre un travail dans les temps alors que l’échéance est proche... Le contrôle de l’anxiété et des émotions négatives est une excellente façon d’optimiser le rendement : il en faut, pour mobiliser ses ressources et se mettre en mouvement, mais pas trop pour garder la maîtrise et la cohérence des résultats voulus !

Le pouvoir de la pensée positive

La différence qui existe entre l’optimiste et le pessimiste est la même qui existe entre celui qui réussit et celui qui échoue. En effet, le rendement est directement proportionnel au degré d’optimisme, d’espérance ou de confiance que l’on a en soi. De même le rire a des effets bénéfiques prouvés dans la résolution de problèmes ; le fait de rire ou d’assister à une émission d’humour provoque une détente du corps et de l’esprit qui stimule une pensée libérée, plus créative et plus souple, facilitatrice dans la recherche de solutions.

L’état de fluidité, un idéal à atteindre

Une longue expérience dans une activité qui nous procure du plaisir peut optimiser le rendement au point de nous faire entrer dans un état de « fluidité », autrement appelé le « flow » : un idéal à atteindre, entre concentration et détente, pour développer une performance sans effort, le summum de l’intelligence émotionnelle. C’est un état que certains artistes, écrivains ou sportifs sont capables de déceler, un état qu’ils aspirent à retrouver aux meilleurs moments de leur activité, un état mental pendant lequel leurs capacités sont au maximum de leur potentiel (cf article – La préparation mentale des sportifs)

 

Les 5 composantes de l’intelligence émotionnelle

Selon Daniel Goleman toujours, le QE (quotient émotionnel) prédit la réussite encore mieux que le QI (quotient intellectuel), notamment dans le monde des affaires. Il reconnaît ainsi l’existence de 25 compétences, indépendantes, interdépendantes et hiérarchisées selon 5 grands axes :

  • La conscience de soi ou la capacité à comprendre ses émotions
  • L’autorégulation ou la maîtrise de soi
  • La motivation interne
  • L’empathie
  • Les aptitudes sociales

La conscience de soi

C’est la capacité de reconnaître et de comprendre les humeurs personnelles, les émotions et les moteurs internes, ainsi que leur effet sur les autres. Les indicateurs de conscience de soi comprennent l’auto-assurance, l’auto-évaluation réaliste, et un sens de l’humour auto-dérisoire. La conscience de soi dépend de la capacité à surveiller son propre état émotionnel et d’identifier et nommer correctement ses émotions.

La maîtrise de soi

C’est la capacité de contrôler ou rediriger les pulsions et les humeurs perturbatrices, et la tendance à suspendre le jugement et de réfléchir avant d’agir. Les indicateurs comprennent la fiabilité et l’intégrité, ainsi que l’acceptation de l’ambigüité et l’ouverture au changement.

La motivation interne

La motivation est un moteur interne qui va au-delà de l’argent et du statut, qui sont tous deux des récompenses externes : vision de ce qui est important dans la vie, le plaisir d’accomplir une tâche, la curiosité d’apprendre, le « flow » qui vient de l’immersion dans une activité. Elle contribue à poursuivre des objectifs avec énergie et persistance. Les indicateurs comprennent une forte envie d’accomplissement, de l’optimisme à l’épreuve des échecs et un engagement organisationnel.

L’empathie

C’est la capacité de comprendre la structure émotionnelle des autres, une habileté mentale qui permet de connaître les personnes en fonction de leurs réactions émotionnelles. Les indicateurs comprennent l’expertise dans la construction et le maintien du talent, la sensibilité interculturelle et le service aux clients. L’empathie concerne l’intérêt et l’implication dans les émotions des autres, la capacité à sentir ce qu’ils ressentent.

Les aptitudes sociales

Les aptitudes sociales correspondent à une certaine habileté dans la gestion des relations et dans la construction de réseaux, ainsi qu’une capacité à trouver des points communs et de construire des liens. Les indicateurs des compétences sociales comprennent l’efficacité dans la conduite du changement, le pouvoir de persuasion, la création d’expertise et le leadership des équipes.

Développer son intelligence émotionnelle revient donc à développer 5 compétences émotionnelles, c’est-à-dire à :

  • Savoir identifier ses émotions et celles des autres
  • Comprendre ses émotions et donc celles des autres
  • Savoir utiliser ses émotions
  • Exprimer ses émotions
  • Réguler ses émotions

Au bénéfice de :

  • Son bien-être : les émotions agréables ou désagréables ont une influence sur notre moral.
  • Sa santé physique : le stress, consécutif à la colère, la tristesse ou la peur, a des effets négatifs sur notre santé physique, alors que le plaisir, le rire ou l’optimisme activent la sécrétion d’hormones comme l’endorphine, qui sont bonnes pour la santé.
  • Plus de performance : au travail ou à l’école, certaines émotions boostent la performance, d’autres au contraire, l’inhibe.
  • Ses relations avec les autres : certaines émotions rapprochent, d’autres éloignent.

Les effets de l’acquisition de compétences émotionnelles sont prouvées (http://apprendreaeduquer.fr/developper-lintelligence-emotionnelle-des-enfants-a-lecole/) :

  • Diminution du stress de 20 à 40%
  • Diminution des frais de santé : visites médicales et médicaments
  • A compétences techniques et intellectuelles égales, les individus qui ont des compétences émotionnelles performent mieux
  • Meilleure qualité des relations et diminution des conflits

 

Développer l’intelligence émotionnelle à l’école : l’éducation émotionnelle

L’éducation émotionnelle regroupe les diverses approches et stratégies éducatives permettant de développer les compétences liées aux différents aspects de la relation à soi-même, aux autres, à l’environnement et à la collectivité.

Elle propose donc, facilite et accompagne les apprentissages en relation avec le bien-être physique, émotionnel et mental, l’estime de soi, l’ancrage dans un espace de confiance et de créativité libérée, le sens de responsabilité envers l’autre et l’environnement.

Fondée sur l’éducation active et participative, sur le jeu et l’interaction ludique, le partage et la coopération, l’éducation émotionnelle vise à promouvoir la coopération et la paix entre les individus, à l’opposé du chacun pour soi, de l’insouciance ou de l’intolérance.

Elle cherche à responsabiliser l’individu, à l’amener à intégrer le fait qu’il est pleinement créateur de sa réalité intérieure d’abord, de sa vie extérieure ensuite, et enfin de la réalité collective dans laquelle il évolue.

L’éducation émotionnelle considère que tout apprentissage relève d’un processus relationnel où l’émotionnel (voire l’affectif) conditionne largement la performance.

Il en résulte deux éléments déterminants pour l’approche pédagogique :

  • Le processus d’apprentissage implique que l’élève apprenne en découvrant progressivement par lui-même, par sa propre expérience, de manière active donc.
  • Quant à l’environnement émotionnel, il implique que doivent être réunies un certain nombre de conditions pour que soient levés les inhibiteurs de l’apprentissage et stimulés ses prérequis.

Les prérequis d’un apprentissage réussi comportent, outre les compétences préalablement acquises, d’indispensables éléments de confiance, d’estime de soi, de motivation et de détente.

Les moteurs des apprentissages sont le désir, le plaisir, l’ambition et la détermination, tandis que l’angoisse, le doute, le pessimisme, le stress et les pressions diverses fonctionnent comme autant d’inhibiteurs.

Et c’est la même chose dans le monde du travail !

 

Des applications multiples dans le travail

Alors que les émotions sont présentes partout et tout le temps, qu’elles nous guident, voire nous gouvernent dans toutes nos prises de décision, elles sont encore aujourd’hui très souvent cachées, niées, voire rejetées dans le monde de l’entreprise. Et pourtant, c’est impossible de s’en défaire... Mieux vaut travailler dessus, les accepter et les intégrer car elles font parties de notre vie, et ainsi pourvoir s’en servir pour être plus performant !

Recrutement : des compétences émotionnelles

Certains l’ont bien compris, et cela se ressent dans le recrutement. Auparavant on validait uniquement les compétences techniques : niveau scolaire, diplômes obtenus, expériences requises, validation d’acquis, savoir-faire.

On a d’abord eu tendance, à compétences égales, à choisir des « personnalités » ou des « potentiels », disait-on, un mode de recrutement à priori complètement subjectif, car typiquement affectif, les prémices de l’intelligence émotionnelle...

Puis on a parlé de savoirs-être, et intégré des compétences comme la capacité d’adaptation, la communication, le travail en équipe ou le leadership ; ce qui a permis de recruter sur des situations observables, c’est-à-dire plus de concret dans la mise en œuvre de ces savoirs-êtres, qu’on pourrait tout simplement appelés « compétences émotionnelles » (mais que l’histoire de l’entreprise nous interdit, les émotions étant encore perçues négativement dans le monde de l’entreprise).

Aujourd’hui on dispose de tests qui permettent de mesurer le quotient émotionnel des candidats. Parfois appelés tests de personnalité, conçus de la même manière que les tests de quotient intellectuel, les résultats de ces tests donnent des indications sur l’intelligence émotionnelle des candidats, informations au moins aussi importantes que les compétences techniques, notamment pour les employeurs qui recrutent des managers.

Management émotionnel et prise de décisions

Selon son concepteur Hiroyuki Umemuro, professeur de management à l'Institut de technologie de Tokyo, le management émotionnel, c’est :

La faculté pour un manager d'identifier et d'intégrer ses émotions et celles d'autrui à sa prise de décision.

De multiples expériences ont démontré que toute décision était nécessairement influencée par la personne même, c’est-à-dire par son vécu, ses croyances, autrement dit ses émotions.

De plus on sait que la performance d’une décision est d’autant plus forte que le quotient émotionnel de la personne qui prend cette décision est élevée.

Ainsi on peut très facilement conclure de l’intérêt évident de développer son intelligence émotionnelle pour quelqu’un qui doit prendre une décision, qui plus est un manager, qui anime une équipe, et prend donc régulièrement des décisions « humaines ».

Et d’ailleurs, il a également été prouvé qu’une équipe était d’autant plus épanouie, donc performante, que son leader était intelligent émotionnellement.

 

Bref, les émotions sont des ressources pour la performance, dont on ne saurait se priver en management ; et nous y reviendrons dans un prochain article plus en détail.

En effet, comme vous l’avez compris, il convient de travailler au développement de son intelligence émotionnelle pour être plus épanoui, et plus performant dans ses prises de décisions ; c’est tout l’objet d’un coaching, individuel ou collectif !

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A venir donc :

  • Développer son intelligence émotionnelle pour mieux manager
  • Les émotions dans le sport : quels enjeux, quels effets ?

Et bien d’autres...

 

Article rédigé par Delphine PICHARD - ENTRE2SPORT

 

Sources diverses :

www.education-emotionnelle.com

www.psychologies.com

www.apprendreaeduquer.fr

 

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