7 septembre 2022
Delphine Pichard

« J’ai gagné au mental ! »
« J’ai fini au mental ! »
« Ça se joue au mental ! »
« C’est le mental qui fait la différence ! »
« Il/elle n’a pas de mental ! »
« Les Français n’ont pas de mental ! »

Dans le sport, j’entends régulièrement ces petites phrases, dans lesquelles on retrouve ce mot « mental », associée à une notion implicite de performance, comme si juste ce mot dans une phrase pouvait résumer la situation, expliquer qu’on ait gagné ou perdu, qu’on ait bien joué ou mal joué, qu’on ait atteint ses objectifs ou pas, justifier que ça ait été facile ou difficile …

 

Alors, phrases toutes faites ou qui ont vraiment du sens ???

J’ai tendance à penser qu’il n’y a pas de fumée sans feu. Et que si on en parle tant que ça, c’est bien qu’il y a quelque chose à creuser, qui serait de l’ordre du mental !

C’est d’ailleurs à l’époque (entre 2014 et 2016), l’une des raisons pour lesquelles j’ai choisi de faire ce beau métier de coach professionnel.
Alors dans une situation personnelle un peu instable il faut le dire, je me suis lancée corps et âme dans la pratique du trail (on va dire course nature au début…). En quelques mois, j’ai été surprise par mes performances, qui m’ont encouragée à continuer dans cette voie, et toute ma vie quotidienne a très vite tourné autour de ma pratique et de mes objectifs sportifs. En me consacrant énormément à cela, que ce soit avec les entraînements quotidiens, avec les déplacements sur les courses le week-end ou encore carrément mes vacances qui se transformaient en bloc de préparation en montagne, j’ai continué de progresser, et de performer ! Plus je m’entraînais et plus mes distances de course s’allongeaient ; donc plus je m’entraînais, et plus j’avais besoin d’objectifs pour continuer de m’entraîner…
Entendons-nous bien, j’étais célibataire sans enfant, ma famille trop loin pour la voir régulièrement, j’avais un job qui me plaisait beaucoup, et plutôt bien payé, ma vie sociale tournait autour du sport, que ce soit avec le club de volley, le club d’athlé dans lequel je m’étais inscrite, ou avec le boulot, vu que j’étais entourée de « sportifs passionnés » 😊.

Une course au mental

Moi - Finisher de la CCC 2015

Bref, c’est dans cette période que j’ai compris les 2 choses principales qui m’animent aujourd’hui, que ce soit pour moi ou dans mes accompagnements :
• L’équilibre entre objectifs et moyens mis en œuvre est très important pour performer
• Le mental n’est pas une fin en soi ; en effet, il n’y a pas de « personnes qui ont du mental », ni « d’autres qui n’en ont pas »…

Mais alors qu’est-ce que c’est ???

 

Le mental est une thématique dans laquelle on peut développer des compétences

Au même titre que le physique ou la technique, on peut entraîner son mental, le préparer aux différentes circonstances de l’entraînement ou de la compétition. Et l’ensemble des facteurs clé de la performance sportive (dimensions physique, technique, tactique et mentale) sont interconnectés : être bien physiquement peut contribuer à être bien mentalement et inversement.

A mon niveau c’est ce que j’ai pu expérimenter quand je dis que plus je m’entraînais, plus mes distances de course s’allongeaient, donc plus je m’entraî nais, et plus j’avais besoin d’objectifs pour continuer de m’entraîner.

Comme dans la dimension physique on peut travailler différentes compétences qui vont nous rendre meilleurs physiquement ; dans la dimension mentale, on peut travailler différents sujets qui vont nous rendre meilleurs mentalement. Dans les 2 cas, cela dépend de la situation initiale, d’où l’importance de pouvoir faire un diagnostic de l’état présent, en fonction duquel on identifie les compétences à développer prioritairement, au regard de l’objectif de performance visé.

Voir ma vidéo sur la préparation mentale : lien

 

Il n'y a pas de prédisposition mentale...

Autant il y a des prédispositions physiques et motrices pour certains sportifs dans leur sport (liées à la génétique, on n’est pas tous taillé comme Teddy R. 😉), autant je ne crois pas qu’il y ait de prédispositions mentales. Je parlerais plutôt « d’histoire de vie » ou de « situation personnelle propice », car oui, il y a tout de même un terrain fertile… L’histoire et/ou la situation de chacun est le socle sur lequel va s’appuyer le sens fondamental qu’on donne à la notion de performance ; c’est comme ça qu’on parle de passion… Les passionnés sont des gens qui font de leur passion le sens de leur vie, et de leur performance la mesure de leur réussite dans la vie… C’est aussi pour cela qu’il est très difficile pour les grands sportifs de se reconvertir… Mais ça, c’est un autre sujet, je m’égare…
Donc je disais qu’il n’y a pas de prédisposition mentale mais plutôt des situations personnelles propices au développement du mental, et donc à la performance !

En ce qui me concerne, voyez-vous, certes j’ai toujours fait du sport, donc j’avais je pense, des prédispositions physiques, et un peu d’expérience de l’entraînement et de la compétition, mais je n’en avais jamais fait à haut niveau. Soi dit en passant, je pense que ma pratique du trail longue distance (à l’époque je courais, roulais, et même nageais tous les jours, et préparais un 50km par mois, pour vous donner un ordre d’idée…), c’est du haut niveau en termes d’exigence et de sollicitations, comme me disait mon ostéo…

Et c’est plutôt ma situation personnelle qui m’a permis de me donner à fond, que ce soit à l’entraînement ou en compétition, et de faire les résultats que j’ai pu faire.

Cette notion de sens est primordiale ! Quand le sens est là, le mental suit…

 

Sens et mental : le pourquoi et le comment

Le sens, c’est le pourquoi je fais ce que je fais, pourquoi je vise telle ou telle performance.
Le mental, c’est plutôt le comment : les décisions que je prends, les moyens que je mets en œuvre pour atteindre mes objectifs, ceux qui ont du sens pour moi.

J’ai pu constater que me fixer des objectifs sportifs me permettait de voyager, que m’entraîner me challengeait dans mon quotidien. Rien d’autre ne m’intéressait à l’époque. Performer dans mon sport était devenu « le sens de ma vie ». Preuve en est, lorsque j’ai rencontré celui qui allait devenir mon mari, j’ai abandonné sur la TDS en 2016 (mon 1er abandon ☹)… Certes j’étais très fatiguée, la saison avait été longue, j’avais très chaud, c’était un four à Bourg St Maurice, mais la motivation à rentrer dormir avec mon nouveau chéri était plus forte que celle de passer la nuit, aussi belle soit-elle, dans la montagne… Bref, je n’avais plus « que le trail dans ma vie », et continuer à souffrir dans ce « four », n’avait pas de sens pour moi à ce moment-là…
Est-ce à dire que je n’ai pas eu de mental ce jour-là ???
C’est en tout cas le raccourci que l’on peut faire… Mais je parlerai plutôt d’une perte de sens !

Un grand coureur de trail disait encore récemment qu’il ne faut pas oublier pourquoi on fait ce sport, et à chaque départ de course, il disait qu’il restait vigilant par rapport à cela… Je pense que ça permet aussi de relativiser, de voir les choses avec un maximum de lucidité, tout en sérénité, et de se sentir à sa place là, dans le sas de départ…

Et je crois que c’est ça « avoir du mental » : savoir pourquoi on est là ! Après, le « comment on y va », ça se travaille évidemment, mais c’est plus facile, c’est presque une formalité 😉

 

Coaching et performance

Se poser la question du sens est fondamental, vous l’aurez compris, et c’est d’ailleurs l’essentiel du travail que je peux faire avec les personnes que j’accompagne. De ce sens découle des objectifs. Puis il s’agit de mobiliser les ressources à disposition, et de lever les freins qui existent encore et qui pourraient empêcher l’atteinte des objectifs.

Le coaching mental, dans sa dimension systémique, est très indiqué dans l’accompagnement à la performance, parce qu’il s’intéresse à la personne dans son environnement, et qu’il intègre la notion de mental dans la globalité du projet de performance.
Après avoir éclairé l’objectif principal, on continue de travailler sur le sens séance après séance (le pourquoi), et on affine petit à petit les actions à mettre en œuvre (le comment) qui vont permettre de trouver l’équilibre nécessaire à la performance.
Il faut souvent revivre certaines expériences, explorer des domaines enfouis, décortiquer des situations délicates comme des situations de réussite, et aussi tester de nouveaux modes de fonctionnement, pour dépasser des croyances qui peuvent être limitantes, avoir la représentation la plus juste de soi et de son environnement, et ainsi prendre conscience du potentiel à développer pour performer.

Ceci étant fait, le coaché sait où il en est, sait où il veut aller, et sait comment il va y aller. Même si le chemin n’est pas simple, il saura se repérer et s’adapter, en toute autonomie !

Au terme d’un processus de coaching, fort d’un sens retrouvé et/ou consolidé, le coaché a fortifié son mental en cohérence avec les objectifs qu’il s’est fixé ! Il est à sa place, et saura trouver sa place sur le chemin qu’il a décidé d’emprunter. Sa performance (une conséquence) n’en sera que plus belle !